100ème SESSION DU CONSEIL INTERNATIONAL DU CACAO-----ALLOCUTION DE S.E.M. DANIEL KABLAN DUNCAN, VICE-PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE DE COTE D’IVOIRE

100ème SESSION DU CONSEIL INTERNATIONAL DU CACAO-----ALLOCUTION DE S.E.M. DANIEL KABLAN DUNCAN, VICE-PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE DE COTE D’IVOIRE

100ème SESSION DU CONSEIL INTERNATIONAL DU CACAO—–ALLOCUTION DE S.E.M. DANIEL KABLAN DUNCAN, VICE-PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE DE COTE D’IVOIRE

• Monsieur le Ministre du Commerce et de l’Industrie de Côte d’Ivoire ;

• Monsieur Philippe Fontayne, Président du Conseil International de l'Organisation Internationale du
Cacao (ICCO) ;

• Monsieur Michel Arrion, Directeur Exécutif de l'ICCO ;

• Excellences, Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs et Membres du Corps diplomatique;

• M. le Maire de la Commune du Plateau ;

• Mesdames et Messieurs les Délégués, représentant les pays membres de l’ICCO ;

• Monsieur le Porte-parole des importateurs ;

• Monsieur le Directeur Général du Conseil du Café-Cacao ;

• Mesdames et Messieurs les représentants des producteurs de cacao ;

• Mesdames et Messieurs les représentants des industriels et négociants de cacao ;

• Honorables invités ;

• Chers Amis des Médias ;

• Mesdames et Messieurs,

Je voudrais d’emblée vous indiquer, que c’est pour moi un insigne honneur de présider, au nom du Président de la République de Côte d’Ivoire, Son Excellence Monsieur Alassane OUATTARA, la cérémonie d’ouverture de la 100ème réunion du conseil international du cacao qui se tient à Abidjan, au bord de la Lagune Ebrié.

En son nom, je voudrais donc vous souhaiter le traditionnel « AKWABA », c’est-à-dire la cordiale bienvenue en terre ivoirienne, terre du Cacao, et particulièrement à Abidjan, perle des lagunes. La Côte d’Ivoire est heureuse et honorée de vous accueillir. Agréable séjour donc en Côte d’Ivoire, pays de l’hospitalité !

Comme vous le savez l’hospitalité ivoirienne s’exprime aussi bien à l’égard des communautés humaines, qu’à l’endroit des institutions bilatérales et multilatérales. C’est en ce sens, que la Côte d’Ivoire n’a ménagé aucun effort, et a été très heureuse d’accueillir officiellement, après un long processus, le siège de l’ICCO, le 25 avril 2017, à Abidjan. Il est à rappeler que la signature de l’Accord de siège est intervenue dès le 22 novembre 2002.

Je tiens également à renouveler nos vives félicitations à Monsieur Michel Arrion, nouveau Directeur Exécutif de l’ICCO, pour son élection, après un processus consensuel, il y a bientôt une année. La nomination d’un ressortissant des pays consommateurs, après que notre compatriote Jean-Marc Anga a occupé cette haute fonction, au titre des pays producteurs, traduit la nécessité d’instituer une plus grande intelligence collaborative entre ces deux groupes de pays.

Excellences, Mesdames et Messieurs

La centième session du Conseil International du Cacao constitue un rendez-vous hautement important dans la vie de l’Organisation Internationale du Cacao, notre Organisation commune. Elle permet de marquer un temps d’arrêt, de faire le bilan de la mise œuvre des décisions et recommandations sorties des quatre-vingt-dix-neuf (99) sessions antérieures et de dégager les nouvelles perspectives en vue de la redynamisation de l’ICCO et pour assurer la durabilité de l’économie cacaoyère. Pour ce faire, nous devons relever des défis majeurs qui se posent à nous.

Excellences, Mesdames et Messieurs,

Je voudrais passer en revue, avec vous, quelques-uns de ces défis qui me paraissent importants. Il s’agit en particulier des quatre (4) principaux défis suivants : (i) le changement climatique, (ii) la valorisation et la transformation du cacao, (iii) la volatilité des cours du cacao et (iv) la consommation des produits à base du cacao.

1. Concernant le changement climatique, ses effets dévastateurs nécessitent de la part des pays producteurs une synergie d’actions, de repenser leurs stratégies de production du cacao et de réorienter leurs politiques agricoles. Je pense notamment à l'Initiative Cacao-Forêt qui est une mise en œuvre concrète de l'Agriculture zéro déforestation, ainsi qu’à la Feuille de route « Cacao, ami de la forêt » du Conseil Café Cacao de Côte d’Ivoire. L'objectif de ces initiatives est de contribuer à développer des solutions durables en vue de relever le défi du changement climatique et celui de l'épuisement des ressources naturelles, en mettant l'accent sur la gestion durable de la cacaoculture, grâce aux nouvelles techniques de « l’agroforesterie ». Il s’agit de favoriser la cohabitation intelligente de l'agriculture et de la forêt.

2. S’agissant de la valorisation et la transformation du cacao, il convient de retenir qu’elle devient une nécessité de plus en plus accrue pour les pays producteurs qui veulent stimuler et créer une prospérité partagée par la création d’une plus grande valeur ajoutée locale. En effet, dans la filière cacao, et selon l’ICCO, la Côte d’Ivoire, le Ghana et le Cameroun qui fournissent à eux seuls environ 70 % de la production mondiale de cacao, ne perçoivent que 3 % des revenus issus de la commercialisation de ce produit.

Pour transformer structurellement l’économie ivoirienne encore largement dominée par l’agriculture, et atteindre l’émergence comme définie par le Président de la République, Son Excellence Monsieur Alassane Ouattara, la Côte d’Ivoire met en œuvre, conformément au nouveau Code des investissements de 2018, une politique d’encouragement à l’investissement, notamment à l’industrialisation par des exonérations fiscales, de crédits d’impôts, etc. La réalisation de l’objectif de changement des modes de production et de consommation qui passe par l’industrialisation devra accroître de manière significative la contribution du secteur industriel à la création de richesses et d’emplois.

En ce qui concerne spécifiquement le cacao, le gouvernement a instauré un système de droit unique de sortie (DUS) différencié au profit des unités industrielles de transformation du cacao qui prennent l’engagement de réaliser, sur une période de cinq ans, une augmentation significative des volumes transformés. Cette nouvelle fiscalité adoptée en décembre 2016 prévoit des taux d’imposition en fonction de la nature du produit et du degré de transformation et se présente comme suit : il est appliqué un taux de 14,6 % pour la fève, de 13,20 % pour la masse, 11 % pour le beurre et le tourteau, 9,60 % pour la poudre, 6,95 % pour la couverture du chocolat, 0 % pour le chocolat.

Cette politique a permis de propulser la Côte d’Ivoire au rang de leader mondial de la transformation primaire devant les Pays-Bas, grâce à une capacité de broyage installée s’élevant à 746 000 tonnes à fin 2018.

3. En ce qui concerne la question cruciale de la volatilité des cours du cacao, elle constitue un problème majeur qui plombe les économies des pays producteurs, surtout lorsque la cacaoculture représente un pan important de ces économies.

Comme vous le savez, à la fin de l’année 2016 et durant toute l’année 2017, le marché international du cacao a connu une baisse brutale des cours entrainant des effets néfastes pour les économies des pays producteurs. C’est donc fort justement que cette épineuse question a été largement traitée lors de la 95ème session du Conseil de l’Organisation Internationale du cacao (ICCO) tenue ici même à Abidjan, du 24 au 28 avril 2017. Faisant suite aux travaux de cette session, une Plateforme multipartite sur la baisse des prix du cacao sur le marché mondial a réuni les délégués des pays exportateurs et importateurs de l’ICCO, ainsi que les Associations de l’industrie et du commerce du cacao, du 18 au 21 juillet 2017, à Bruxelles, en vue de trouver les solutions durables à cette problématique.

Nous sommes convaincus que des actions concertées doivent être conduites dans une plus grande transparence du marché, afin que les prix internationaux reflètent au mieux le rapport entre l’offre et la demande mondiale de cacao. La régulation de l’offre mondiale de cacao doit intégrer la nécessité de maîtriser la production à travers l’anticipation des besoins du marché. A cet effet, il est impérieux, pour les pays producteurs de disposer de données statistiques sur la filière afin de contrôler la production (recensement des producteurs, inventaire des ressources végétales, rendements, variétés, âge, etc.).

Les réformes entreprises par la Côte d’Ivoire, à partir de l’année 2012 dans la filière en intégrant le système du Programme de Ventes Anticipées à la Moyenne (PVAM), ont permis de garantir des revenus plus rémunérateurs aux producteurs et d’améliorer la qualité de la production.

Excellences, Mesdames et Messieurs

Ensemble, pays producteurs, pays consommateurs et tous les intermédiaires se doivent de rechercher et de trouver des solutions et alternatives durables à la problématique de la volatilité des cours du cacao.

Notre engagement commun doit permettre d’assurer une économie cacaoyère durable car, « un juste prix est indispensable pour favoriser la consommation sans décourager les producteurs ». Il ne fait aucun doute que producteurs et consommateurs sont parties liées dans un partenariat gagnant-gagnant pour assurer la viabilité et la durabilité de l’industrie cacaoyère. En effet, la durabilité est liée à ce que « toutes les parties prenantes dans la filière puissent en tirer un revenu décent ».

En tant que les deux premiers pays producteurs de cacao, la Côte d’Ivoire et le Ghana qui représentent 62% du marché avec une production commune d’environ 3 millions de tonnes, ont signé le 28 mars 2018, à Abidjan, un accord d’harmonisation de leurs politiques de commercialisation de cacao destiné à améliorer le prix d’achat de la fève aux producteurs. Ainsi, ces deux pays ont institué notamment « la politique ivoiro-ghanéenne de mise en place d'un Différentiel de revenu décent (DRD) de 400 dollars US par tonne pour tout contrat de vente de cacao obtenu auprès d’eux pour la campagne 2020/2021, avec pour objectif d'atteindre un prix plancher de 2 600 dollars US la tonne FOB ». Ils sont parvenus à un accord avec les négociants et les industriels, à partir de la campagne 2020-2021.

Excellences, Mesdames et Messieurs

4. Le quatrième défi est celui de la promotion de la consommation qui apparaît comme l’une des meilleures solutions à explorer dans l’avenir par les pays producteurs. En effet, le taux de consommation est indéniablement faible dans les pays producteurs. En Afrique, il est d’environ 4 %. Le marché de la consommation du chocolat dispose encore d’une importante marge de progression liée à la montée en puissance de la classe moyenne, avec un pouvoir d’achat de plus en plus élevé et qui ne consomme pas suffisamment de chocolat et de produits chocolatés.

Il nous faut inclure dans le régime alimentaire des élèves, notamment dans les cantines scolaires, afin que la consommation du chocolat intègre leurs habitudes alimentaires, dès le très jeune âge.

Actuellement, le marché africain du chocolat reste assez marginal dans l’industrie mondiale avec une consommation par habitant estimée à environ 500 g par an, contre un niveau pouvant aller de 4 à 12 kg dans les pays occidentaux.

Les compagnies chocolatières, et notamment de nombreuses PME souvent nationales sont créées dans nos pays pour produire du chocolat comme c’était le cas dans les pays d’Amérique latine qui est aussi une région importante du cacao. Il y a donc un marché important pour les produits probablement moins luxueux, au commencement.

Il est aussi impérieux de se tourner davantage vers les grands marchés émergents encore peu exploités comme l’Inde, la Chine et la Russie. Il s’agit là d’un véritable potentiel que nous nous devons tous de mieux exploiter.

En Côte d’Ivoire, le niveau moyen de consommation annuelle est estimé à moins de 200 grammes de produits dérivés du cacao par habitant. C’est pourquoi, le gouvernement encourage des évènements comme, la Journée Nationale du Cacao et du Chocolat (JNCC) organisée par le Conseil du Cacao de Côte d’Ivoire destinés à favoriser la consommation de masse du chocolat.

De même, au Cameroun, le Festival sur le Cacao dénommé « FESTICACAO » est une initiative hautement salutaire.

Excellences, Mesdames et Messieurs

La révision de l’Accord International de 2010 sur le Cacao entamée depuis le mois juillet 2018 mérite d’être poursuivie et achevée. En effet, elle constitue l’heureuse occasion de traduire dans le nouveau texte l’ensemble des préoccupations et défis prioritaires pour arriver à bâtir une véritable économie cacaoyère durable.

Je salue donc le Groupe de Travail qui a permis de passer en revue les 65 articles de cet Accord. Les propositions faites seront certainement soumises à l’approbation du Conseil. Je voudrais donc saluer l’ensemble des pays membres de l’ICCO dont l’engagement et la détermination nous permettront de bâtir une nouvelle vision de notre économie cacaoyère.

Excellences, Mesdames et Messieurs
Il n’est un secret pour personne que sur environ les 100 milliards de dollars US (environ 60.000 milliards de FCFA) que représente l’industrie du cacao, seulement 6 milliards de dollars US (environ 3.600 milliards de FCFA), soit 6 % reviennent aux producteurs. La différence, soit 94 milliards de dollars US (environ 56 400 milliards de FCFA) est engrangé par les industriels et autres intermédiaires.

Cette situation qui est l’une des principales causes de la précarisation des conditions de vie des millions de producteurs et des difficultés des économies des pays producteurs doit évoluer favorablement pour devenir un véritable partenariat gagnant-gagnant.

C’est dans ce sens que nous apprécions l’engagement soutenu de l’industrie du cacao et du chocolat et les partenaires de cette industrie tels que les ONG internationales (World Cocoa Foundation, Jacobs Foundation, etc.) à travers toutes les initiatives visant à améliorer les conditions sociales dans les communautés productrices du cacao.

Excellences, Mesdames et Messieurs

Avant de terminer mon propos, je voudrais remercier vivement toutes les délégations qui ont bien voulu faire le déplacement d’Abidjan pour prendre part à ces importantes assises, et vous souhaiter un séjour riche et agréable dans notre capitale économique, Abidjan.

Enfin, en formulant des vœux de pleins succès à vos travaux, je déclare, au nom de SEM Alassane OUATTARA, Président de la République de Côte d’Ivoire, ouverte la 100ème session du Conseil International du cacao.

Vive l’ICCO !
Vive l’économie cacaoyère durable !

Je vous remercie de votre aimable attention.

Close